Un anticoagulant qui diminuerait le risque de cancer

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Rédigé par Estelle B. et publié le 15 décembre 2017

La warfarine fait parti d’un des nombreux anticoagulants prescrit dans le traitement et la prévention de divers accidents cardiovasculaires. Outre son efficacité thérapeutique, ce médicament pourrait réduire le risque de certains cancers chez les patients de plus de 50 ans, selon une récente étude. Un effet secondaire plutôt bénéfique pour ce médicament.

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La warfarine : un anti-vitamine K

La warfarine est un médicament de la classe des anti-vitamines K (généralement notés AVK). Les AVK sont des anticoagulants indirects. Ils bloquent la réduction de la vitamine K et empêchent ainsi la synthèse des formes actives de plusieurs facteurs de la coagulation (les facteurs II, VII, IX et X).

À savoir ! La coagulation sanguine est un processus complexe qui aboutit à la formation de caillots sanguins. Elle fait notamment intervenir différentes protéines, dont les facteurs de coagulation. La coagulation sanguine se produit naturellement en cas de blessure pour stopper ou réduire une hémorragie.

Les AVK (anticoagulants) sont prescrits, soit dans le traitement de certaines pathologies vasculaires (formations anormales de caillots sanguins), soit en prévention secondaire chez les patients ayant des antécédents d’accidents cardiovasculaires ou portant un implant cardiaque.

La warfarine est indiquée dans la prise en charge de plusieurs pathologies :

  • Les cardiopathies emboligènes (affections cardiaques consécutives à l’arrêt ou à la réduction de la circulation sanguine irriguant une partie du myocarde) ;
  • L’embolie pulmonaire ;
  • L’infarctus du myocarde ;
  • Les thromboses veineuses (formations de caillots sanguins dans le réseau sanguin veineux).

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La warfarine : des propriétés anti-tumorales ?

Si la warfarine est un médicament capital pour de nombreux patients touchés par un accident cardiovasculaire, ce principe actif pourrait-il avoir un autre rôle thérapeutique ? Des études expérimentales ont précédemment suggéré que la warfarine possédait des propriétés anti-tumorales (anti-cancéreuses), en bloquant l’une des voies de la formation des tumeurs.

Cependant, la transposition de ces résultats dans des études cliniques ou des études cas-témoins n’a abouti jusque-là qu’à des résultats contradictoires et peu probants.

Pour mieux comprendre si la warfarine pouvait jouer un rôle dans la cancérogenèse, des chercheurs norvégiens ont mené une étude de population à plus grande échelle. L’étude a ainsi porté sur 1 256 725 personnes, d’âge compris entre 52 et 82 ans, suivis sur une durée moyenne de 6,15 ans. Parmi les participants, 7,4 % suivaient un traitement par la warfarine (avec une durée moyenne de traitement de 4,7 ans) et 10,6 % ont eu un diagnostic de cancer au cours de la période de suivi.

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L’arrivée des nouveaux anticoagulants oraux

Un cancer a été diagnostiqué chez 9,4 % des personnes traitées par la warfarine contre 10,6 % des personnes non traitées. Les résultats de l’étude révèlent que l’incidence globale des cancers diminue significativement après un traitement d’au moins 6 mois par la warfarine. Cette baisse significative se vérifie pour les localisations cancéreuses les plus fréquentes, comme le poumon, la prostate ou le sein.

En revanche, aucune différence d’incidence n’a pu être observée lorsque l’intervalle de temps entre le traitement par la warfarine et le cancer était inférieur à 2 ans. L’indication du traitement par la warfarine jouait également un rôle important, puisque le risque de cancer était supérieur après un évènement thromboembolique veineux ou une embolie pulmonaire par rapport aux autres indications thérapeutiques.

Les résultats de cette étude suggèrent qu’un traitement par warfarine sur plusieurs mois, au-delà de son utilité thérapeutique, pourrait conférer une certaine protection face au risque de certains cancers. La mise sur le marché et le développement de nouveaux médicaments anticoagulants oraux depuis quelques années, qui viennent en partie remplacer la warfarine, pourrait ainsi avoir un impact sur l’épidémiologie des cancers dans les décennies à venir.

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Estelle B.,  Docteur en Pharmacie

Sources
– SUBSTANCE ACTIVE WARFARINE. vidal.fr. Consulté le 14 décembre 2017.
– Association of Warfarin Use With Lower Overall Cancer Incidence Among Patients Older Than 50 Years. pubmed.ncbi.nlm.nih.gov. Consulté le 14 décembre 2017.