Dans une recommandation validée par un collège d’experts le 26 septembre dernier, la Haute Autorité de santé recommande de repérer d’autres anomalies chromosomiques que la trisomie 21 lors d’un dépistage basé sur l’ADN fœtal libre circulant dans le sang de la mère. Ce dépistage prénatal non invasif sera étendu aux trisomies 2, 8, 9, 13, 14, 15, 16, 18 et 22.
Pourquoi cette nouvelle recommandation des autorités de santé ?
Depuis 2018, la « stratégie de dépistage prénatal de la trisomie 21 » a évolué en proposant systématiquement un examen de l’ADN fœtal libre circulant à toute femme enceinte dont l’examen combiné du premier trimestre montre un risque de trisomie 21.
À savoir ! Le risque de trisomie 21 au premier trimestre est repéré par différents paramètres dont l’âge de la mère, la clarté nucale (espace situé à l’arrière de la nuque de l’embryon ou du foetus) mesurée à l’échographie et en réalisant un dosage de marqueurs sériques maternels. Ce risque de trisomie 21 se situe entre 1/1000 et 1/51.
Ce test, ayant pour objectif de limiter le recours à l’amniocentèse, recherche une surreprésentation du nombre de copies du chromosome 21 (chromosome concerné en cas de trisomie 21) au sein de l’ADN libre circulant dans le sang maternel.
Par ailleurs, les prélèvements invasifs (amniocentèse ou choriocentèse) pour un diagnostic ne sont désormais effectués seulement si le risque est supérieur ou égal à 1/50 ou si le résultat par l’examen de l’ADN fœtal libre circulant est positif pour la trisomie 21.
À savoir ! L’amniocentèse est une opération médicale permettant de prélever du liquide amniotique à partir de la 15e semaine de grossesse. La choriocentèse consiste à prélever par aspiration du tissu chorionique (cellules du futur placenta). A l’issue de l’un de ces prélèvements, les cellules sont analysées pour réaliser un caryotype, l’arrangement de l’ensemble des chromosomes d’une cellule.
Ce type de dépistage non invasif (DPNI) ciblant la trisomie 21 et nécessitant uniquement une prise de sang chez la femme enceinte pour analyser l’ADN fœtal libre circulant possède des avantages, mais aussi un inconvénient majeur.
Il constitue d’une part un diagnostic précoce et efficace tout en s’épargnant de prélèvement invasif chez la femme enceinte qui n’est pas sans risque pour le fœtus. Mais, d’autre part, il s’accompagne d’une diminution du repérage des anomalies chromosomiques autres que la trisomie 21 du fait de la réduction du nombre de caryotypes réalisés.
Les caryotypes permettent en effet de détecter des « anomalies chromosomiques » comme un chromosome en trop ou en moins ou un fragment chromosomique absent ou en trop.
Les autres trisomies à dépister
Compte tenu de la bonne valeur prédictive du dépistage par l’examen de l’ADN fœtal libre circulant comparativement aux autres indications de recours au caryotype, la HAS a élargi le dépistage à neuf autres trisomies.
« Ces anomalies chromosomiques sont en effet considérées comme compatibles avec une grossesse évolutive et susceptibles d’entraîner des conséquences fœtales ou obstétricales d’une particulière gravité » précise la HAS.
Trois types d’anomalies seront recherchées chez les femmes déjà éligibles à un dépistage de trisomie 21 par examen de l’ADN fœtal libre circulant ;
- Les anomalies chromosomiques à risque de conséquences cliniques fœtales graves : trisomies 2, 8, 9, 13, 14, 15, 18 et 22 ;
- Les anomalies chromosomiques à risque de conséquences obstétricales graves et notamment avec des conséquences placentaires : la trisomie 16 dont le repérage précoce pourrait modifier la prise en charge de la grossesse ;
- Les anomalies segmentaires non cryptiques déséquilibrées.
Inclure davantage de femmes dans les DPNI
En outre, la Haute Autorité suggère d’étendre les indications des examens de l’ADN fœtal libre circulant aux femmes :
- Ayant eu un antécédent de grossesse avec aneuploïdie (nombre anormal de chromosomes) ;
- Portant (elle-même ou leur conjoint) une translocation robertsonienne impliquant un chromosome 13 ;
- Possédant de profil de marqueurs sériques maternels évocateurs de trisomie 13 (1 cas pour 15 000 naissances) ou une trisomie 18 (1 cas pour 6 000 naissances).
À savoir ! Une translocation robertsonienne est un remaniement chromosomique provoqué par 2 chromosomes particuliers qui fusionnent. Environ un nouveau-né sur 1000 a une translocation robertsonienne. Par exemple, dans certains cas de trisomie, la translocation robertsonienne est non équilibrée et le bébé a trois copies du bras long du chromosome en question au lieu de deux.
Ces nouvelles recommandations de dépistage devront s’accompagner d’une information éclairée auprès de toutes les femmes enceintes. La HAS soutient l’idée qu’il est nécessaire de former les prescripteurs pour assurer une communication claire et pédagogique. L’autonomie des femmes dans la prise de décision devra être aussi respectée. « Le droit de ne pas savoir doit aussi être respecté » souligne l’Agence de Biomédecine qui a travaillé sur ces nouvelles recommandations.
Rédigé par Julie P.
– Examens basés sur l’ADN libre circulant réalisés dans le cadre du dépistage de la trisomie 21/ Opportunité du repérage d’autres anomalies chromosomiques. www.has-sante.fr. Consulté le 09 octobre 2024.