La douleur serait à l’origine des deux tiers des consultations médicales et à chaque instant un Français sur deux présente une douleur. Sa prise en charge est donc un enjeu crucial pour les patients et les équipes médicales. Mais si l’arsenal thérapeutique contre la douleur est déjà conséquent, il reste encore inefficace dans certaines situations. Pourtant, il n’est pas si facile de mettre au point de nouveaux médicaments antalgiques.
Douleurs et médicaments antalgiques
La douleur accompagne un grand nombre de maladies aigües ou chroniques, bénignes ou graves. Sa prise en charge repose principalement sur la prescription de médicaments contre la douleur, les médicaments antalgiques.
Trois catégories de médicaments antalgiques sont distinguées, en fonction de l’intensité des douleurs qu’ils sont susceptibles de soulager :
- Les médicaments antalgiques de palier I, destinés aux douleurs légères à modérées, parmi lesquels :
- Le paracétamol ;
- L’aspirine ;
- Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) comme l’ibuprofène, le kétoprofène ou le naproxène ;
- Les médicaments antalgiques de palier II, destinés aux douleurs modérées ou sévères, ainsi qu’aux douleurs non soulagées par les antalgiques de palier I :
- La codéine ;
- La dihydrocodéine ;
- Le tramadol ;
- Les médicaments antalgiques de palier III, destinés aux douleurs intenses résistantes aux autres médicaments antalgiques :
- La morphine ;
- Divers dérivés morphiniques tels que le hydromorphone ou l’oxycodone.
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De nouveaux médicaments contre la douleur
Dans la plupart des cas, un traitement antalgique approprié et bien observé permet de soulager les douleurs ressenties par les patients. Mais les recherches de nouveaux médicaments contre la douleur se poursuivent pour résoudre deux types de problématiques :
- Certains médicaments antalgiques présentent des effets indésirables importants et sont donc parfois mal tolérés par les patients ;
- Certaines douleurs restent rebelles aux médicaments antalgiques existants.
Dans certains cas, les médecins ont recours à d’autres médicaments, qui peuvent dans des situations particulières soulager la douleur :
- Des anesthésiques locaux, comme la lidocaïne ou la procaïne (lien : );
- Des antispasmodiques dans les coliques néphrétiques ou les colites ;
- Certains antidépresseurs pour la prise en charge des douleurs neuropathiques ;
- Des myorelaxants dans les lombalgies pour leur action de relaxation musculaire ;
- Certains antiépileptiques pour le traitement des douleurs liées au zona ou des douleurs d’origine neurologique.
Mais le développement de nouveaux médicaments antalgiques demeure d’un grand intérêt thérapeutique.
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La flupirtine en suspens
Parmi les médicaments antalgiques récents, la flupirtine est autorisée depuis 1984, comme alternative aux antalgiques de paliers II et III et aux AINS pour le traitement des douleurs aigües et chroniques, notamment dans les situations suivantes :
- Les contractures musculaires douloureuses ;
- Les céphalées de tension ;
- Les douleurs cancéreuses ;
- Les dysménorrhées (douleurs liées aux règles) ;
- Les douleurs consécutives à un traumatisme, une intervention chirurgicale ou une blessure.
Ce médicament est disponible dans 11 pays de l’Union Européenne, mais pas en France. Récemment, l’Agence Européenne des Médicaments (EMA) a lancé un examen des produits contenant de la flupirtine, suite aux signalements d’effets indésirables graves. Ce nouvel antalgique est en effet susceptible d’induire des atteintes hépatiques parfois graves, allant jusqu’à une insuffisance hépatique.
L’examen demandé par l’EMA a permis de réaliser plusieurs constats :
- La flupirtine ne serait pas toujours utilisée conformément aux recommandations formulées en 2013 par l’EMA;
- La survenue d’atteintes hépatiques graves serait à l’origine d’un rapport bénéfice / risque défavorable.
Compte-tenu de ces observations, l’EMA a recommandé le retrait des autorisations de mise sur le marché de la flupirtine dans les états membres où elle était disponible. Cet exemple met en lumière les difficultés pour mettre au point un nouveau médicament, entre la recherche perpétuelle d’une meilleure efficacité thérapeutique et les risques liés aux effets indésirables.
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Estelle B., Docteur en Pharmacie
– Meeting highlights from the Pharmacovigilance Risk Assessment Committee (PRAC). European Medicines Agency. 27 October 2017.
– PRAC recommends that the marketing authorisation of the painkiller flupirtine be withdrawn. European Medicines Agency. EMA/66114/2018. 9 February 2018.