Syndrome aérotoxique : que cache l’air qu’on respire en avion ?

Par |Publié le : 14 juin 2025|Dernière mise à jour : 12 juin 2025|3 min de lecture|

Et si l’air que l’on respire à bord des avions n’était pas aussi sain qu’il y paraît ? Depuis plusieurs années, des personnels navigants et des passagers signalent des troubles inexpliqués après des vols. En cause : le syndrome aérotoxique, une affection liée à la pollution de l’air dans les cabines pressurisées. Longtemps ignorée, cette pathologie fait aujourd’hui l’objet d’avis scientifiques et de décisions judiciaires.

Qu’est-ce que le syndrome aérotoxique ?

Le syndrome aérotoxique désigne un ensemble de symptômes survenant après l’inhalation de substances potentiellement toxiques circulant dans l’atmosphère intérieure des avions. L’air injecté dans la cabine, dit bleed air, est prélevé sur les moteurs, ce qui peut entraîner la présence de résidus chimiques issus des huiles ou fluides hydrauliques, notamment des organophosphorés, comme les TCP, connus pour leurs effets neurotoxiques.

Les symptômes les plus fréquemment rapportés incluent :

Ces signes peuvent apparaître brutalement ou s’installer progressivement, ce qui complique leur identification et leur lien avec un vol précis.

Qui est concerné par le syndrome aérotoxique ?

Les premiers touchés sont les pilotes, hôtesses et stewards. Leur exposition répétée à l’air des cabines augmente le risque de développer des symptômes sévères, avec parfois des conséquences professionnelles majeures : arrêts maladie de longue durée, inaptitude au vol.

Les passagers peuvent eux aussi être concernés. Même s’ils sont exposés sur une période plus courte que les personnels navigants, ils respirent le même air de cabine. Ainsi, tout individu à bord est susceptible d’inhaler des contaminants. Les personnes âgées, les enfants ou celles présentant des troubles respiratoires ou neurologiques peuvent réagir plus fortement à cette exposition. Les vols longs ou répétés peuvent également majorer les effets.

Quelle reconnaissance juridique et médicale du syndrome aérotoxique ?

Longtemps remis en cause, l’existence du syndrome aérotoxique gagne aujourd’hui en crédibilité juridique et scientifique. Deux décisions rendues à Toulouse en avril 2025 ont marqué un tournant :

  • La cour d’appel a confirmé la faute inexcusable de la compagnie EasyJet, après le recours d’un pilote intoxiqué par des fumées de réacteur ;
  • La CPAM de la Haute-Garonne a été condamnée pour avoir refusé la reconnaissance du syndrome comme maladie professionnelle.

Les magistrats ont retenu que l’exposition aux TCP était avérée, et que les troubles décrits s’appuyaient sur des publications scientifiques et observations cliniques cohérentes. Ces décisions pourraient faire jurisprudence, alors que plusieurs enquêtes sont en cours.

Dans un avis publié en septembre 2024, l’Anses souligne cependant que le syndrome aérotoxique n’est pas formellement défini sur le plan médical, du fait de la diversité et du manque de spécificité des symptômes. Toutefois, elle reconnaît l’existence d’événements de contamination de l’air en cabine. L’agence recommande d’intensifier les recherches, de renforcer la traçabilité des cas suspects, et de développer des outils de mesure et de détection permettant d’objectiver les expositions en vol.

Certains constructeurs aéronautiques ont commencé à prendre des mesures concrètes. Aux États-Unis, Boeing a équipé son Dreamliner d’un système de compresseurs électriques, excluant le recours au bleed air. En Europe, Liebherr-Aerospace a déposé un brevet pour un système équivalent, bien que non encore utilisé sur les avions Airbus.

La pression des associations, les études scientifiques et les avancées judiciaires pourraient accélérer l’adoption de ces technologies. Car au-delà des enjeux de santé publique, c’est aussi la sécurité des vols qui est concernée : des troubles cognitifs ou des pertes de vigilance en vol peuvent avoir des conséquences graves.

Sources
– AVIS révisé1 de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, anses. www.anses.fr. Consulté le 02 juin 2025.
– https://france3-regions.franceinfo.fr/occitanie/haute-garonne/toulouse/le-syndrome-aerotoxique-reconnu-par-la-justice-une-existence-legale-a-la-maladie-pour-les-victimes-pilotes-ou-personnels-navigants-3161991.html. . Consulté le 02 juin 2025.

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Julie R.
Infirmière pendant 15 ans, dont 10 en pédiatrie, Julie R. est animée par une passion pour la santé, l'écologie et les sciences. Spécialisée en rédaction web SEO, alliant respect de notre charte HIC et approche humaine, elle met son expérience au service d’une meilleure compréhension de la santé pour le plus grand nombre