La dissection spontanée de l’artère coronaire (SCAD), l’infarctus du myocarde de la femme ?

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Rédigé par Estelle B. et publié le 28 juin 2023

Plus de 200 femmes décèdent chaque jour en France des suites de maladies cardiovasculaires, devenues la première cause de mortalité féminine. Des chercheurs se sont récemment intéressés à une forme particulière d’infarctus du myocarde, la dissection spontanée de l’artère coronaire (SCAD), qui toucherait très majoritairement des femmes aux alentours de la quarantaine. Explications.Infarctus femme

Les femmes, une santé cardiovasculaire différente de celle des hommes

Les femmes sont de plus en plus touchées par les maladies cardiovasculaires, et ce de plus en plus jeunes. L’infarctus du myocarde n’échappe pas à cette règle avec une augmentation des hospitalisations de 4,8 % pour ce motif entre 2009 et 2013 chez les femmes âgées de 45 à 54 ans. Alors qu’elles étaient auparavant plus préservées que les hommes face au risque cardiovasculaire, l’évolution des modes de vie entraîne un rééquilibrage des chiffres de morbidité cardiovasculaire entre les deux sexes.

Mais l’évolution du mode de vie n’explique pas tout. Les femmes présenteraient souvent des symptômes atypiques lors d’un infarctus du myocarde, retardant le diagnostic et donc la prise en charge : une sensation d’épuisement, un essoufflement à l’effort, une douleur aigue dans le haut du dos, des palpitations soudaines ou des signes digestifs récurrents. De plus, les femmes pourraient être touchées par une forme particulière d’infarctus du myocarde, la dissection spontanée de l’artère coronaire, souvent notée simplement SCAD.

La SCAD, dissection spontanée de l’artère coronaire, un infarctus typiquement féminin ?

Parmi les cas recensés de SCAD, 90 % sont des femmes en bonne santé aux alentours de la quarantaine. Cette forme d’infarctus pourrait représenter jusqu’à un tiers des cas féminins avant l’âge de 60 ans. Mais la dissection spontanée de l’artère coronaire reste encore mal comprise des scientifiques et souvent sous-diagnostiquée. Une récente étude internationale, dont les résultats viennent d’être publiés dans la revue scientifique Nature Genetics, s’est intéressée aux causes génétiques et aux mécanismes biologiques de la SCAD. Pour cette étude, les données génétiques de plus de 1 900 patients et d’environ 9 300 personnes en bonne santé ont été comparées. Cette comparaison a abouti à l’identification de 16 régions génomiques associées à une prédisposition génétique à la dissection spontanée de l’artère coronaire.

Par ailleurs, des variants génétiques impliqués dans le « ciment » qui entoure les cellules de l’artère coronaire ont été retrouvés chez les femmes ayant survécu à une SCAD. L’un des gènes code pour un facteur de coagulation tissulaire. En temps normal, il provoque la coagulation au niveau des cellules de l’artère pour résorber d’éventuels hématomes. Lorsque l’expression de ce gène est réduite, les artères auraient des mécanismes de réparation altérés, et seraient donc plus susceptibles de se déchirer spontanément, provoquant de fait une SCAD.

Un suivi cardiovasculaire des femmes différent de celui des hommes

Ce mécanisme de mauvaise résorption de l’hématome serait ainsi une cause génétique de l’infarctus du myocarde chez les femmes, une cause inconnue jusqu’alors. Par ailleurs, l’étude a pu mettre en évidence un autre facteur de risque de SCAD : une pression artérielle élevée. En revanche, d’autres facteurs de risque cardiovasculaire connus seraient sans impact sur la survenue d’une dissection spontanée de l’artère coronaire :

Un tel résultat se révèle très intéressant pour mieux cibler la surveillance cardiovasculaire des femmes jeunes. Le suivi de la tension artérielle serait un critère très pertinent. Enfin, les données génétiques suggèrent que les causes génétiques et les mécanismes biologiques à l’origine d’une SCAD chez une femme jeune sans facteurs de risques seraient opposés à ceux provoquant un infarctus du myocarde lié à l’athérosclérose chez un homme plus âgé avec facteurs de risques. Des données qui amèneraient à suivre de manière totalement différente les hommes et les femmes. A ce jour, le suivi cardiovasculaire des femmes est calé sur celui des hommes !

Estelle B., Docteur en Pharmacie

Sources
– Une avancée majeure sur la génétique et les facteurs de risque d’une forme d’infarctus qui touche majoritairement les femmes. presse.inserm.fr. Consulté le 9 juin 2023.
– Une progression alarmante de l’infarctus chez les femmes. www.agirpourlecoeurdesfemmes.com. Consulté le 9 juin 2023.