Les vertus insoupçonnées d’un médicament contre la polyarthrite rhumatoïde

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Rédigé par Estelle B. et publié le 15 février 2023

Tous les organes du corps humain vieillissent au fil des années, et le processus de production des cellules sanguines à partir de la moelle osseuse, l’hématopoïèse, n’échappe pas à la règle. Une récente étude décrypte les mécanismes responsables de ce vieillissement et révèlent l’intérêt d’un médicament utilisé dans la polyarthrite rhumatoïde pour contrer ce phénomène. Des travaux publiés dans la revue scientifique Nature Cell Biology.

Vu au microscope du sang interleukine polyarthrite rhumatoïde

Des cellules souches hématopoïétiques aux cellules sanguines

Toutes les cellules sanguines, les globules rouges, les globules blancs et les plaquettes, sont produites à partir des cellules souches hématopoïétiques présentes dans la moelle osseuse. La moelle osseuse est un tissu spongieux, situé au centre des os. A côté des cellules souches hématopoïétiques, la moelle osseuse renferme des cellules productrices de différentes substances, qui contribuent au développement et à la régulation de la production des cellules sanguines.

Tout au long de notre existence, les cellules souches hématopoïétiques produisent des cellules sanguines, dont la durée de vie reste relativement courte, de l’ordre de 120 jours pour un globule rouge. Mais comme le reste des fonctions de l’organisme, cette fonction hématopoïétique vieillit au fil des années. Avec l’âge, la capacité des cellules souches hématopoïétiques se dégrade et expose les personnes âgées à des risques accrus d’anémie et d’affaiblissement du système immunitaire (risque majoré d’infections et de développement de certains cancers). Si différentes études se sont intéressées à l’altération progressive des capacités des cellules souches hématopoïétiques, peu d’études ont été menées sur les autres cellules de la moelle osseuse.

L’inflammation responsable du vieillissement de la production des cellules sanguines

Récemment, des chercheurs ont mené une étude sur des modèles de souris. Ils ont observé que la moelle osseuse de souris âgées présentait une composition cellulaire modifiée et une altération de la vascularisation, par rapport aux souris jeunes. De plus, certaines cellules de la moelle osseuse des souris âgées exprimaient des marqueurs de l’inflammation, dont l’interleukine-1-béta. L’interleukine-1-béta participerait au phénomène de vieillissement de la production des cellules sanguines à partir des cellules souches hématopoïétiques.

Or l’interleukine-1-béta est connue par ailleurs pour être impliquée dans le développement et l’évolution de certaines pathologies inflammatoires chroniques, comme la polyarthrite rhumatoïde. L’un des traitements de la polyarthrite rhumatoïde cible justement les récepteurs à l’interleukine-1, l’anakinra. L’anakinra est capable de neutraliser l’activité biologique de l’interleukine-1-alpha et de l’interleukine-1-béta en bloquant leur liaison sur les récepteurs cellulaires. Ce médicament est indiqué en seconde intention dans la polyarthrite rhumatoïde et permet de limiter l’activité de la maladie.

Un médicament capable de stopper le vieillissement de la moelle osseuse ?

Les chercheurs ont alors eu l’idée de traiter les souris âgées avec l’anakinra pendant deux semaines. Ils ont alors observé que la moelle osseuse des souris âgées retrouvait des fonctions comparables à celle des souris jeunes, en termes de production des cellules sanguines. Parallèlement, les souris déficientes génétiquement en récepteurs de l’interleukine-1 ne présentaient pas le niveau de vieillissement classique de la moelle osseuse des souris âgées.

Cette nouvelle étude a mis en évidence le rôle de l’inflammation et en particulier de l’interleukine-1, un marqueur inflammatoire, dans le vieillissement de la production des cellules sanguines à partir de la moelle osseuse. Les traitements ciblant l’interleukine-1 se révélaient capables chez la souris de contrer ce vieillissement. Une découverte importante qui pourrait permettre de mieux maîtriser le vieillissement de la moelle osseuse chez l’homme, et donc de réduire le risque de certaines pathologies (infections, cancers) chez les personnes âgées. Reste à savoir si les résultats observés chez la souris sont transposables chez l’homme !

Estelle B., Docteur en Pharmacie

Sources
– Stromal niche inflammation mediated by IL-1 signalling is a targetable driver of haematopoietic ageing. nature.com. Consulté le 15 février 2023
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