Obésité infantile : à quel âge faut-il commencer la prévention ?

Par |Publié le : 4 septembre 2025|Dernière mise à jour : 2 septembre 2025|4 min de lecture|

Dès le plus jeune âge, des signaux peuvent alerter sur un risque futur de surpoids chez l’enfant. Le Dr Georges Thiébault, pédiatre, insiste sur la nécessité d’intervenir tôt, bien avant que les kilos s’installent. Entretien.

Le surpoids chez l’enfant ne se manifeste pas toujours de façon brutale. Il peut s’installer progressivement, sans éveiller l’inquiétude. Pourtant, c’est précisément entre 3 et 6 ans que certains signes doivent alerter. « Pour nous, pédiatres, la période la plus cruciale se situe entre 3 et 6 ans », souligne le Dr Georges Thiébault, pédiatre à Montpellier et membre de l’AFPA (Association Française de Pédiatrie Ambulatoire). C’est à cet âge que l’on peut repérer une évolution anormale de la courbe de corpulence, bien avant que l’obésité ne soit visible. Il s’agit notamment de détecter un rebond d’adiposité précoce, c’est-à-dire une remontée anormale de l’indice de masse corporelle (IMC), qui devrait naturellement diminuer à cet âge.

« Il est essentiel de peser et mesurer régulièrement l’enfant, au moins une à deux fois par an, et de tracer ces données sur le carnet de santé. Cela permet de suivre la courbe et de repérer toute dérive progressive. »

Des kilos qui s’installent insidieusement

Contrairement à une idée reçue, l’obésité infantile ne s’installe pas brusquement. Elle se développe de manière progressive et discrète, souvent sans que les parents – ou les professionnels – ne s’en rendent compte immédiatement. « Un enfant peut sembler simplement “bien portant”, avec une bonne mine. Mais si la courbe monte doucement, sans que la taille suive, c’est un signal d’alerte. »

Ce suivi attentif permet d’intervenir avant que la prise de poids ne devienne problématique et difficile à corriger à l’adolescence ou à l’âge adulte.

Des facteurs multiples, au-delà de l’alimentation

Les causes du surpoids infantile dépassent largement les seules questions de nutrition. « On ne peut pas se contenter de parler d’alimentation. Il faut s’intéresser au mode de vie global de l’enfant », explique le pédiatre. Sommeil insuffisant, temps d’écran excessif, absence d’activité physique, repas pris trop rapidement ou devant la télévision sont autant de facteurs qui favorisent la prise de poids.

« Il ne s’agit pas seulement de faire du sport une fois par semaine. Il faut bouger au quotidien, marcher, aller à l’école à pied, jouer dehors. Aujourd’hui, l’activité physique a drastiquement diminué chez les enfants. »

Accompagner la famille, sans stigmatiser

Plutôt que de pointer du doigt un “problème de poids”, le Dr Thiébault privilégie une approche bienveillante, tournée vers l’accompagnement. « On ne dit pas à la famille “il y a un problème”. On montre la courbe, on discute, on se revoit un mois plus tard, et on évalue les progrès. » L’objectif n’est pas de prescrire un régime, mais d’encourager de petits changements durables : rééquilibrer les repas, retrouver un rythme de sommeil adapté, limiter les écrans, favoriser le jeu actif.

Il insiste également sur le rôle clé des parents : « C’est à eux de poser un cadre. Un enfant roi qui mange ce qu’il veut, se couche quand il veut, aura plus de risques. L’éducation est essentielle. »

Pas de régime ni de traitement, mais un suivi régulier

En l’absence de pathologie sous-jacente (maladie endocrinienne, trouble thyroïdien…), l’obésité infantile ne relève pas d’un traitement médical, mais d’un suivi dans le temps. « On peut utiliser un petit cahier de suivi où l’on note, à chaque consultation, un point à travailler : l’activité physique, le rythme des repas, le sommeil… L’important, c’est de revenir régulièrement et de garder le lien. »

Le pédiatre précise que les pathologies hormonales sont rares et que la plupart des situations peuvent être prises en charge en ville, sans recours à un spécialiste.

Un rôle préventif dès la petite enfance

Si la période 3-6 ans est centrale, la prévention peut démarrer encore plus tôt. Dès la grossesse, certains facteurs peuvent influer : diabète gestationnel, surpoids maternel, tabac… Et après la naissance, l’allaitement, la diversification alimentaire, ou encore le respect du rythme de l’enfant sont autant d’éléments à surveiller.

« Il faut aussi rassurer les parents : un enfant qui “mange peu” mais suit bien sa courbe et est en bonne santé n’a pas besoin d’être suralimenté. »

L’adolescence, une deuxième période critique

Enfin, le Dr Thiébault rappelle que l’adolescence constitue une nouvelle phase à risque. « C’est un âge où l’enfant devient acteur de ses choix. Il faut le voir deux fois par an, pour faire le point sur sa croissance, ses habitudes, son équilibre global. » Des changements positifs sont possibles, même à ce stade : « J’ai vu des ados obèses qui, en deux ans, ont changé par eux-mêmes. Quand la motivation vient d’eux, le résultat est souvent spectaculaire. »

Peggy Cardin-Changizi

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Peggy Cardin
Peggy Cardin
Journaliste spécialisée en santé
Peggy Cardin-Changizi Journaliste spécialisée en santé depuis plus de vingt ans. Elle traite des sujets de prévention, de santé publique et de médecine au quotidien, avec pour objectif de rendre l'information médicale claire, fiable et accessible à tous. Rédige un contenu scientifique fiable avec des sources vérifiées en respect de notre charte HIC.