Pilule contraceptive masculine: où-en est la recherche ?

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Rédigé par Julie P. et publié le 10 avril 2019

En mars 2018, une endocrinologue américaine, Stephanie Page, présentait ses résultats cliniques sur la sécurité d’un contraceptif masculin à base de DMAU ou diméthandrolone undécanoate. Un an plus tard, toujours lors du congrès annuel de la société d’endocrinologie, Stephanie Page avance qu’un deuxième contraceptif oral vient de passer les premiers tests cliniques d’innocuité : le 11-beta-MNTDC (11-beta-methyl-19-nortestosterone). Quels sont les résultats cliniques de cette dernière étude ? Que-reste t-il encore à faire avant de voir arriver ces pilules contraceptives masculines sur le marché ?

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Premiers essais sur la pilule 11-beta-MNTDCf

Pour mettre au point un contraceptif oral masculin, les chercheurs doivent relever deux défis : réduire la concentration en testostérone qui contrôle la production de spermatozoïdes et éviter l’apparition des effets secondaires liés à cette baisse hormonale (diminution de la libido (désir sexuel), par exemple).

À savoir ! Le but d’un contraceptif masculin est d’obtenir un éjaculat contenant moins d’un million de spermatozoïdes par millilitre, contre 15 à 150 millions en temps normal. En dessous de cette concentration, on considère que le risque de grossesse non désirée est quasi nulle.

Pour tester la molécule synthétique 11-beta-MNTDC (11-beta-methyl-19-nortestosterone), une testostérone modifiée combinant l’action de l’hormone masculine et d’une progestérone, les chercheurs du Los Angeles Biomed Research Institute et de la faculté de médecine de l’université de Washington, ont tout d’abord réuni 40 hommes en bonne santé âgés de 18 à 50 ans.

À savoir ! La testostérone est une hormone produite par les testicules et par les deux glandes surrénales – qui sont situées au-dessus des reins. A la puberté, elle est responsable de l’apparition des poils pubiens, de la barbe, de la spermatogenèse et de l’accroissement de la masse musculaire. Chez l’homme, un taux normal de testostérone est compris entre 10 et 30 nmol/L puis ce taux diminue après 45 ans. Elle intervient dans différentes fonctions comme la spermatogenèse, la diminution du mauvais cholestérol, la protection du système cardiovasculaire et la régulation de l’humeur.

Sur les 40 sujets inclus dans l’étude, 30 ont reçu le 11-beta-MNTDC et 10, un placebo pendant 28 jours.

Les résultats ? Malgré la chute du taux de testostérone chez les hommes prenant le médicament, aucun événement indésirable grave n’a été constaté. De plus, l’arrêt du traitement a permis de restaurer la fonction hormonale masculine : le traitement est donc réversible.

Les chercheurs ont relevé cependant quelques cas de fatigue, maux de tête, acné, baisse de la libido (5 hommes) et dysfonction érectile légère (2 hommes).

« Nos résultats suggèrent que cette pilule, qui combine deux activités hormonales dans une, va diminuer la production de sperme tout en préservant la libido » a déclaré Christina Wang, la chercheuse qui a réalisé l’étude clinique en coopération avec Stephanie Page.

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Tester les molécules contraceptives sur le long terme

Même si la moitié des hommes sont motivés à essayer des méthodes contraceptives par voie orale, il faudra encore attendre une dizaine d’années pour voir ces nouveaux médicaments sur le marché.

Ces premières recherches montrent que les molécules, 11-beta-MNTDC ou DMAU, peuvent être utilisés avec sécurité sur des hommes en bonne santé pendant un mois.

Grâce à de nouvelles études cliniques, les chercheurs doivent encore s’assurer que les molécules contraceptives :

  • Stoppent la production de sperme efficacement (processus qui peut prendre de 60 à 90 jours) ;
  • N’entraînent pas d’effets indésirables sur le long terme (perte de la libido, dépression, perte des caractères sexuels secondaires, prise de poids, risque cardiovasculaire) ;
  • Provoquent des effets réversibles (l’arrêt du traitement permettant une restauration de la fonction endocrine).

Dans la continuité du développement d’une contraception masculine durable et réversible, les chercheurs se penchent également sur la piste d’un gel injectable dans les canaux déférents (reliant testicules et prostate) empêchant les spermatozoïdes de sortir des testicules.

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Julie P., Journaliste scientifique

– A new ‘male birth control’ pill might be safe, but there’s still a long way to go, researchers say. CNN. Consulté le 9 avril 2019.
– Second potential male birth control pill passes human safety tests. Endocrine Society. Consulté le 9 avril 2019.