Traumatisme de l’enfance : du parent à l’enfant

Actualités Neuro / Psy (enfant)

Rédigé par Estelle B. et publié le 1 février 2018

Différentes études ont précédemment montré qu’un traumatisme important au cours de l’enfance impacte non seulement l’enfant, mais aussi le futur adulte qu’il va devenir. Plus récemment, une étude menée sur des enfants finlandais a suggéré que l’effet du traumatisme pourrait se répercuter également sur la génération suivante, sans que cette dernière ait vécu un tel traumatisme.

Traumatisme de l'enfant

Enfance et traumatisme

Les enfants ayant vécu une situation particulièrement traumatisante, telle qu’une guerre, un exode, le décès d’un parent ou une maladie grave, sont plus exposés à l’âge adulte à des problèmes de santé mentale que les autres enfants.

Les enfants victimes de la guerre, d’un génocide, ou encore les enfants réfugiés sont privés de leur condition même d’enfant, pourtant nécessaire à leur bon développement. Ils subissent un stress post-traumatique, identique à celui vécu par les victimes d’attentats terroristes. Cette forme particulière de stress se manifeste par une tendance à revivre en permanence l’expérience traumatique, au travers d’hallucinations ou de cauchemars, et à éviter systématiquement tout ce qui peut rappeler le traumatisme.

Face à de telles situations, les enfants sont à la fois les sujets les plus fragiles, mais aussi ceux qui ont la plus grande capacité à guérir. Le traumatisme psychologique chez l’enfant se manifeste à court ou moyen terme par différents troubles, tels que :

  • Des troubles du sommeil (cauchemars, terreurs nocturnes) et des hallucinations ;
  • Des problèmes alimentaires (perte de poids, refus d’alimentation, dénutrition, anorexie) ;
  • Des troubles psychosomatiques (douleurs intestinales ou gastriques, vomissements, diarrhées, migraines, chute de cheveux, allergies) ;
  • Des troubles du langage jusqu’à l’adolescence ;
  • Des problèmes de développement comme la perte de contrôle des sphincters, des difficultés d’apprentissage, des problèmes d’orientation dans l’espace et le temps ;
  • Des désordres affectifs (tristesse, dépendance affective, agressivité… ) pouvant aller jusqu’à la schizophrénie et des formes particulières d’autisme;
  • Des troubles du comportementaux à l’adolescence (vols, alcoolisme, suicides, prostitution… ).

Comme les adultes, chaque enfant réagit différemment à un traumatisme donné, en fonction de son âge, de sa situation familiale, des circonstances et de la structure familiale. Les répercussions sont également variables selon le type de traumatisme en cause.

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L’exemple du génocide rwandais

Parmi les situations traumatisantes vécues à grande échelle par des enfants au cours des dernières décennies, figure le génocide rwandais. En août 1994, l’UNICEF a réalisé une enquête auprès de 207 enfants rwandais, âgés de 9 à 15 ans, vivant dans des centres d’accueil.

Ces enfants avaient été exposés à des traumatismes psychologiques graves :

  • 91 % avaient vécu la mort d’un membre de leur famille ;
  • 56 % ont vu tuer un membre de leur famille ;
  • 56 % ont été témoins visuels de l’agression ou du décès d’une personne ;
  • 48 % ont été menacés de mort ;
  • 42 % ont vu des enfants tuer d’autres enfants ;
  • 90 % se sont cachés pour se protéger.

Ces situations particulièrement traumatisantes ont eu des répercussions importantes sur ces enfants :

  • 92 % y pensent involontairement ;
  • 53 % ont des problèmes de concentration ;
  • 60 % pensent ne pas vivre longtemps ;
  • 30 % se sentent coupables de ne pas avoir pu protéger leur famille ;
  • 75 % essaient de s’occuper pour ne plus penser.

Ces résultats révèlent l’impact psychologique majeur d’un conflit sur les enfants.

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Une transmission à la génération suivante

Qu’un évènement traumatique impacte un enfant, et plus tard l’adulte qu’il deviendra, paraît évident pour de nombreuses personnes. Mais imaginer que de tels effets se transmettent à la génération suivante peut sembler plus surprenant. Pourtant, une récente étude finlandaise suggère cette transmission.

Des chercheurs ont ainsi suivi 46 877 frères et sœurs, nés entre janvier 1933 et décembre 1944, ainsi que leurs 93 391 descendants, nés entre janvier 1950 et décembre 2010. Au cours de la seconde guerre mondiale, certains enfants (2 992 dans l’étude) ont été évacués vers la Suède et placés dans une famille d’accueil.

Les enfants ayant vécu un tel traumatisme ont présenté à l’âge adulte un risque d’hospitalisation psychiatrique majoré par rapport aux enfants non traumatisés. Ce sur-risque a perduré chez les enfants de la seconde génération, mais uniquement chez les femmes. Ces résultats suggèrent un effet trans-générationnel sexe-dépendant des traumatismes de l’enfance.

Si les enfants victimes de traumatismes requièrent une attention toute particulière pour limiter autant que possible les répercussions sur leur vie d’enfant puis d’adulte, leurs descendants pourraient avoir les mêmes besoins. Des résultats à prendre en compte pour tous les enfants impliqués dans les conflits actuels ou exposés à de graves traumatismes.

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Estelle B. / Docteur en Pharmacie

– Traumatisme de l’enfant victime de la guerre : Le cas des enfants rwandais après le génocide de 1994. Florence DA SILVA. Février 1996.
– Association of the World War II Finnish Evacuation of Children With Psychiatric Hospitalization in the Next Generation. Santavirta, T. and al. 2017. JAMA Psychiatry. Doi:10.1001/jamapsychiatry.2017.3511.
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