Conduites suicidaires


Rédigé par Estelle B. et publié le 6 août 2024

Personne qui pense à se suicider

Les conduites suicidaires comprennent plusieurs comportements. Elles incluent le suicide qui est un acte entraînant la mort. La tentative de suicide qui n’entraîne pas la mort et les idées suicidaires. Plusieurs facteurs peuvent favoriser ces comportements : une pathologie psychiatrique (dépression par exemple), des difficultés sociales ou économiques, des antécédents familiaux, une expérience traumatisante, etc. Plusieurs signes (mots ou comportements) peuvent annoncer un suicide imminent. La détection de ces derniers est essentielle pour dépister les conduites suicidaires. La prise en charge est psychiatrique et/ou médicamenteuse, elle repose sur la gestion des troubles ou difficultés sous-jacentes.

Qu’est-ce qu’une conduite suicidaire ?

Le terme « conduites suicidaires » recouvre plusieurs entités différentes :

  • La tentative de suicideest le passage à l’acte non fatal du suicidant, acte auto-agressif destiné à mettre fin à sa vie mais auquel il survit ;
  • Le suicide(du latin sui caedere, se tuer soi-même) est l’acte délibéré de mettre fin à sa propre vie. Dans le domaine médical, on parle aussi d’autolyse (du grec auto- : soi-même, et -lyse : destruction) ;
  • Les idéations suicidaires sont les idées selon lesquelles le suicide pourrait constituer une solution à la situation ou bien à la douleur morale et à la détresse dans laquelle la personne se trouve et qu’elle juge insupportables. Elles se différencient des idées de mort en ce sens que le sujet se représente alors un acte volontaire et dirigé contre lui-même ;
  • La crise suicidaire ;
  • La menace suicidaire correspond à la situation où la volonté de suicide est clairement exprimée oralement, par écrit, ou par tout autre moyen de communication ;
  • Un équivalent suicidaire est une conduite ou un comportement où la prise de risque est importante même sans intention suicidaire exprimée. L’existence d’équivalents suicidaires n’empêche pas une réelle tentative de suicide, et fait même partie des facteurs favorisants. Les équivalents suicidaires recouvrent différentes situations, comme certains refus de soins au cours de maladies graves, certains accidents ou prises de risques extrêmes, etc….

Au niveau mondial, l’épidémiologie du suicide varie beaucoup selon les pays, et parfois même entre communautés différentes dans un même pays. Les tentatives de suicide sont beaucoup plus fréquentes, mais leur nombre est très difficile à évaluer.

Le nombre de décès par suicide a connu, en France, une augmentation importante au cours des 30 dernières années. Après une période de baisse dans les années 2010, les chiffres tendent à repartir à la hausse depuis la crise sanitaire, qui a fortement impacté la santé mentale des Français, en particulier les jeunes. Le suicide représente 2 % des décès toutes tranches d’âge confondues. C’est la première cause de mortalité chez les moins de 30 ans (20 % des décès masculins, 15 % des décès féminins).

Les récidives suicidaires sont fréquentes, 43 % de ceux qui ont fait une tentative de suicide en referont une autre, dont la moitié dans l’année qui suit le premier geste. Près de 4 tentatives sur 10 sont en fait des récidives.

Certaines personnes sont-elles plus exposées que d’autres au suicide ?

Dans le suicide, plusieurs paramètres entrent en ligne de compte :

  • Le sexe: Dans tous les pays le suicide touche plus les hommes que les femmes, même si cet écart tend actuellement à se réduire : en France actuellement, il y a 2.6 suicides masculins pour 1 suicide féminin. Un rapport inverse s’observe pour ce qui est des tentatives de suicide (la tentative de suicide est bien plus fréquente chez la femme que chez l’homme).
  • L’âge : On peut rencontrer des suicides à tout âge mais deux pics se dégagent : l’adolescence et le grand âge. Des études montrent que chez les adolescents, entre 15 et 19 ans, 20% des garçons et 35% des filles ont des idées suicidaires.
  • Le contexte social : Les caractéristiques sociales des personnes qui décèdent de suicide en France diffèrent de celles qui effectuent une tentative : schématiquement, les premières sont plus souvent âgées (entre 35 et 45 ans ou au-delà de 75 ans), de sexe masculin, en situation de rupture conjugale récente et vivant en milieu rural, et les secondes sont jeunes (15 à 34 ans), de sexe féminin et plus souvent des citadines.
  • Le niveau socio-économique : De nos jours un haut niveau socioculturel réduirait le risque de suicide (c’était l’inverse au début du XXème siècle), les suicides « réussis » étant plus fréquents dans des populations fragiles : personnes à la retraite, au chômage, divorcées, sans enfants, citadines, vivant seules. Les taux augmentent dans les périodes d’incertitude économique bien que la pauvreté ne soit pas une cause directe.

Par ailleurs, plusieurs facteurs de risque du suicide sont identifiés :

  • La dépression ;
  • Une pathologie psychiatrique, comme la schizophrénie ou les troubles bipolaires ;
  • Un caractère impulsif ;
  • Le fait d’avoir un problème de santé ou un handicap grave ;
  • Des antécédents de tentatives de suicide ;
  • L’alcoolisme ou une toxicomanie ;
  • Le fait d’être victime de harcèlement.

Par ailleurs, il est admis que les idées suicidaires sont plus fréquentes en cas d’antécédents familiaux de suicide, de conflits conjugaux, de perte ou abandon précoce d’un parent, de violence psychologique ou sexuel, de maladie psychiatrique d’un parent.

Quels sont les signes évocateurs de conduites suicidaires ?

Les personnes qui pensent au suicide laissent, en général, plusieurs indices à leur entourage. Ça peut être n’importe quoi : des mots, des comportements, des émotions, etc.

Plusieurs messages, plus ou moins directs, peuvent exprimer une intention de suicide : « je veux partir », « je n’en peux plus », « je ne vous dérangerai plus longtemps », « je vais me tuer », etc.

Par ailleurs, un individu qui a des idées suicidaires peut présenter divers troubles physiques ou psychiques : fatigue, insomnie, négligence de l’apparence physique, anxiété, tristesse, irritabilité, agressivité, rumination, troubles de la mémoire, etc. Des difficultés professionnelles (burnout, perte d’investissement, arrêts de travail, etc.) et relationnelles (isolement social, refus de contact physique par exemple) peuvent aussi être associées.

Enfin, certains comportements témoignent d’un passage à l’acte imminent :

  • Mise en ordre des affaires personnelles associé à un apaisement anormal ;
  • Rationalisation de la décision de se donner la mort, ou au contraire, grande émotivité ;
  • État de tétanie lié à une dépression ou à la douleur psychique ;
  • Expression du mal-être omniprésent ou totalement occulté ;
  • Recherche d’un moyen (médicaments, arme, etc.) pour le suicide ;
  • Expression du sentiment d’avoir tout tenter pour aller mieux ;
  • Isolement anormal.

A noter ! L’intention de se suicider se manifeste un peu différemment chez les adolescents. Pour les filles, la souffrance psychique se manifeste surtout par des douleurs corporelles ou des atteintes volontaires à leur intégrité physique (scarifications, anorexie). Les garçons ont plutôt tendance à s’exprimer par la violence ou la prise de risque inconsidérée (alcoolisation, consommation de drogues, etc.). Un changement brutal de comportement ne doit dans tous les cas pas être pris à la légère.

Comment diagnostiquer les conduites suicidaires ?

Les conduites suicidaires peuvent être identifiées grâce aux observations de l’entourage ou la parole de la personne concernée. Au moindre doute, il ne faut pas hésiter à en parler à un professionnel de santé.

Une première évaluation psychiatrique peut être réalisée par un professionnel de santé (médecin, psychiatre, etc.) formé à la prise en charge d’un comportement suicidaire. Celle-ci a pour but d’identifier les éléments à l’origine de la volonté ou de la tentative de suicide afin de pouvoir par la suite mettre en place un comportement adapté.

Dans un second temps, un bilan complet de l’état de santé mentale du patient peut être réalisé afin de diagnostiquer les éventuels troubles associés (dépression par exemple). La famille et les amis proches peuvent aussi parfois être reçus par le médecin.

Quels sont les traitements des conduites suicidaires ?

La prise en charge est pluridisciplinaire, coordonnée par le médecin traitant et le psychiatre. Elle peut reposer sur une thérapie psychiatrique associée ou non à un traitement médicamenteux (anxiolytique, antidépresseurs, etc.).

Tous les troubles associés doivent être pris en charge afin de prévenir le passage à l’acte ou les récidives. Une hospitalisation peut devenir nécessaire en cas de crise suicidaire ou de tentative de suicide.

Outre les professionnels de santé, il existe également d’autres structures pouvant proposer un soutien aux personnes ayant des idées suicidaires :

  • SOS Amitié avec une permanence téléphonique 24h/24 et 7j/7 au 09 72 39 40 50 ;
  • Suicide Ecoute avec une permanence téléphonique 24h/24 et 7j/7 au 01 45 39 40 00 ;
  • SOS Suicide Phénix disponible 7j/7 de 13h à 23h au 01 40 44 46 45 ;
  • Association La Porte ouverte qui propose des entretiens en face à face. Les séances de soutien sont anonymes et gratuites.

Estelle B., Docteur en Pharmacie

Sources
– Idées et conduites suicidaires chez l’enfant et l’adolescent : prévention, repérage, évaluation et prise en charge. www.has-sante.fr. Consulté le 22 juillet 2024.
– Suicide écoute. www.suicide-ecoute.fr. Consulté le 22 juillet 2024.
– Conduites suicidaires dans les régions françaises pendant et à la suite de la crise sanitaire. www.santepubliquefrance.fr. Consulté le 22 juillet 2024.

 

 

 

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