Dénutrition des seniors


Rédigé par Charline D. et publié le 12 septembre 2022

Dame qui vient aider une sénior chez elle

En France, plus de 2 millions de personnes âgées souffrent de dénutrition. Entre 4 et 10% des personnes âgés vivant à leur domicile sont concernées. En institution, le pourcentage de personnes âgées dénutris oscille entre 15 et 38%, et à l’hôpital, entre 30 et 70%. Toute perte de poids involontaire chez une personne âgée doit conduire à une consultation avec le médecin généraliste. Selon la sévérité de la dénutrition, le médecin dispose de plusieurs options : augmentation des apports énergétiques (repas plus riches et plus fréquents, compléments nutritionnels oraux), nutrition entérale ou parentérale.

Définition, prévalence et symptômes de la dénutrition des séniors

Définition

La dénutrition est définie par l’HAS comme étant « un déséquilibre entre les apports nutritionnels et les besoins de l’organisme entraînant des pertes tissulaires, notamment musculaires, qui ont des conséquences fonctionnelles délétères ». Cet état nutritionnel est caractérisé par un manque d’énergie et une carence en protéines et en nutriments. Diverses complications peuvent en découler : une faiblesse musculaire, des infections, une guérison retardée, voire même le décès.

Chez la personne âgée, la dénutrition correspond à une diminution de ses apports alimentaires pouvant provoquer diverses carences et un affaiblissement de la santé. Par conséquent, un état de dénutrition peut s’instaurer progressivement ou rapidement.

Les apports nutritionnels recommandés chez les seniors sont situés aux alentours de 35kcal/kg/jour, soit 1 800 kcal dont 1g/kg/jour de protéines.

Certains comportements doivent alerter les proches et l’équipe soignante : La perte d’appétit (c’est-à-dire lorsque le patient ne finit pas son repas ou en saute), la perte de poids involontaire, le repli sur soi.

Prévalence de la dénutrition

Elle augmente avec l’âge. On distinguera plusieurs cas de figure :

  • À domicile
    Les données sont modérément fiables du fait du peu d’enquête réalisée à domicile. On estime que 4 à 10% des personnes âgées vivant à domicile sont dénutries. Ce chiffre est très probablement en dessous de la réalité.

un homme âgé qui mange seul et souffre de dénutrition

  • À l’hôpital
    Les études sont plus nombreuses et plus fiables du fait d’actions de dépistage plus fréquentes. Les données mettent en évidence que 30% à 70% des malades âgés hospitalisés sont dénutris.
  • En institution
    Les chiffres sont très variables et on estime que 15% à 38% des personnes âgées vivant en institution sont dénutries.

Une dénutrition peut être entraînée ou aggravée par la situation sociale, psychique ou pathologique d’un senior. Ainsi, plusieurs situations, liées ou non à l’âge, peuvent être à risque chez une personne âgée :

  • Une pathologie comme un cancer, une atteinte organique, des troubles digestifs, une infection, un alcoolisme, etc. ;
  • Un régime particulier (amaigrissant, sans sel, etc.) ;
  • Certains traitements qui peuvent par exemple engendrer une somnolence, des troubles digestifs ou une sécheresse buccale.
  • Des affections bucco-dentaires (mauvaise hygiène bucco-dentaire, appareillage mal adapté, sécheresse buccale, candidose) ;
  • Une maladie psychique et/ou neurologique, par exemple la maladie d’Alzheimer ou la maladie de Parkinson, certains troubles du comportement ou la dépression ;
  • Un évènement psycho-social particulier (deuil, isolement, etc.).

Symptômes

L’un des principaux signales d’alarme de la dénutrition est la perte de poids :

  • Plus de 3 kg en 1 mois ;
  • Plus de 6 kg en 6 mois.

Les autres symptômes possibles sont variables. Ils peuvent se traduire par de la fatigue, une apathie, un visage creusé, des cheveux ternes et cassants, une peau sèche, une poignée de main moins ferme, une baisse des interactions sociales, une perte d’intérêt pour des loisirs, etc.

En effet, il n’est pas indispensable d’être médecin ou soignant pour détecter les signes de dénutrition. Ils sont facilement identifiables par :

  • Le port de vêtements plus larges qui camouflent le corps ;
  • L’observation des habitudes alimentaires et de l’appétit ;
  • La perte de muscle (marche plus lente, diminution du volume des cuisses ou des bras,) ;
  • La mesure du poids tous les mois : la dénutrition est avérée si la perte de poids dépasse 5% en 1 mois.

Les conséquences de la dénutrition chez la personne âgée peuvent être dramatiques. Les personnes affaiblies peuvent contracter toutes sortes d’infections ou pathologies. Il est donc important de savoir détecter précocement les premiers signes de cet état nutritionnel.

Diagnostic, dosages biologiques et traitement pour lutter contre la dénutrition des séniors

Diagnostic

La perte de poids est le signe qui doit alerter, que l’on soit un professionnel de santé ou non. Effectivement, toute perte de poids involontaire supérieure à 5% en 1 mois doit conduire à une consultation médicale, ou à minima à des mesures correctives.

Le dépistage de la dénutrition doit être systématique chez la personne âgée. Il repose sur un interrogatoire (sur les habitudes de vie, l’alimentation, et sur une éventuelle perte d’autonomie) et la prise de diverses mesures dont le poids, la taille, l’IMC (on parle de dénutrition pour un IMC inférieur à 21), la masse musculaire et la masse graisseuse.

Réalisation de dosages biologiques en complément de l’examen clinique

Le dosage de l’albuminémie

Ce dosage est majeur pour évaluer une dénutrition. L’albumine reflète le métabolisme protéique. Elle doit être dosée dès que l’IMC est inférieur à 21 chez une personne âgée pour laquelle il y a une suspicion de dénutrition.

Par ailleurs, le dosage de l’albuminémie permet de déterminer le type de dénutrition (par carence en apport ou par hyper catabolisme). On parle d’hypoalbuminémie lorsque le taux est ≤ 35 g/l.

Le dosage de la transtyrétinémie

La transpyréthine est le reflet de la synthèse protéique à court terme.

Son dosage est utile pour suivre la renutrition du patient. On parle d’hypotransthyrétinémie lorsque le taux est ≤ 110 mg/l

Le dosage de la protéine C réactive

Le dosage de la CRP permet d’évaluer l’état inflammatoire du patient. Une CRP élevée est en faveur d’un hypercatabolisme

À domicile, le dépistage doit avoir lieu au moins une fois par an en l’absence de pathologie, et plus souvent, en cas d’apparition de nouvelle pathologie ou en cas de changement de vie afin de dépister au plus tôt la dénutrition. Que ce soit à l’hôpital ou en institution, le dépistage doit être réalisé dès l’admission de la personne âgée et doit régulièrement être réévalué :  environ 1 fois par mois en institution.

Traitement

Plus la prise en charge sera précoce, plus elle sera efficace. Elle dépend de divers paramètres comme le statut nutritionnel du patient, les pathologies et handicaps associés et les besoins du malade et de sa famille. Trois types de thérapeutiques peuvent être envisagées.

L’alimentation par voie orale en première intention

Elle repose sur divers conseils nutritionnels, un enrichissement de l’alimentation associé ou non à des compléments nutritionnels oraux (mélanges nutritifs complets) et une aide humaine ou technique à la prise alimentaire. Les CNO (compléments nutritifs oraux) doivent être pris en dehors des repas, durant les collations, et ne pas se substituer à l’un des trois repas de la journée. Ils se conservent maximum une journée une fois ouvert dans le réfrigérateur.

La nutrition entérale

Elle est envisagée en deuxième intention lorsque la nutrition orale n’est pas possible ou insuffisante. Cette option thérapeutique implique une hospitalisation de quelques jours pour la mise en place d’une sonde nasogastrique et la formation du patient et de son entourage. Lors du retour à domicile, un prestataire de service spécialisé ou encore une infirmière à domicile prennent le relais pour les soins. Ce type de nutrition fait l’objet d’un suivi médical rapproché (poids, tolérance, observance, évolution de la pathologie ;

La nutrition parentérale, nutrition artificielle par voie intraveineuse

Elle est indiquée uniquement en cas de situations particulières comme les occlusions intestinales (interruption partielle voire totale du transit), l’échec de la nutrition entérale ou en cas de malabsorptions sévères. Une hospitalisation est nécessaire.

Il existe plusieurs stades de dénutrition. Ainsi, le médecin adapte sa prise en charge en fonction de la sévérité de celle-ci.

On parle de dénutrition modérée dans tous les cas où le patient peut encore s’alimenter. Une majoration des apports énergétiques, associée ou non à des compléments nutritionnels oraux, est suffisante.

On parle de dénutrition sévère lorsque le patient ne s’alimente plus seul. Dans ce cas, le médecin peut prescrire des compléments nutritionnels oraux, et éventuellement une nutrition entérale.

Pour prévenir la dénutrition, il est important de s’alimenter correctement, et de prendre du plaisir à manger. Les personnes âgées ont des besoins alimentaires plus élevés que le reste de la population. En effet, à l’inverse des idées reçues, les besoins alimentaires ne diminuent pas avec l’âge. Ainsi, passé l’âge de 70 ans, il est conseillé d’éviter les jeûnes alimentaires, en conservant 4 repas (petit déjeuner, déjeuner, gouter et diner) par jour. Il faut toujours laisser au moins 3h entre chaque repas. Il faut prendre le prendre le temps de manger. Un repas doit se dérouler en minimum 30 minutes.

Quelques conseils pour une bonne alimentation ?

  • Consommer en priorité des aliments riches en protéines tels que la viande, le poisson ou les œufs, à raison d’une fois par jour ;
  • Augmenter le nombre de collations par jour ;
  • Boire beaucoup d’eau, de l’ordre de 8 à 10 verres, dans la journée ;
  • Lutter contre l’ostéoporose en consommant des produits laitiers ;
  • Ne pas oublier les vitamines !

Enfin, instaurer un environnement favorable (au calme avec un mobilier et des ustensiles de cuisine adapté) est un point à ne pas négliger.

A noter ! Il est important de maintenir une activité physique (jardinage, marche, etc.) d’au moins 30 minutes par jour, consécutives ou non, afin de conserver une masse musculaire suffisante. La pratique d’une activité physique permet également d’éviter les situations d’isolement, voire de dépression.

Publiée le 30 juin 2020 et mis à jour le 12 septembre 2022 par Charline D., Docteur en pharmacie.

Sources
– Dénutrition : un vrai risque chez nos seniors. Causes et symptômes. lamutuellegenerale.fr. Consulté le 12 septembre 2022.
– Dénutrition de la personne âgée : quelles solutions ? institut.amelis-services.com. Consulté le 12 septembre 2022.

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