Contamination au cadmium : renforcer le dépistage en médecine de ville
Le cadmium, un métal lourd hautement toxique, contamine l’ensemble de la population française, via notamment le tabac et l’alimentation. Depuis plus d’une dizaine d’années, les autorités sanitaires tirent la sonnette d’alarme. Début juin, une nouvelle mise en garde des professionnels de santé a incité le ministre de la Santé a déployé le remboursement de son dépistage en médecine de ville.

Les sources de contamination au cadmium ?
À l’instar des autres métaux, le cadmium est naturellement présent dans l’environnement. Grâce à sa résistance à la chaleur, il est très utilisé dans la production de batteries, de certains revêtements anticorrosion et de peintures.
Mais il se retrouve surtout dans les engrais phosphatés, des fertilisants fabriqués à partir de roches contenant du phosphore. D’après certaines estimations d’expert de l’INRAE (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement), les engrais phosphatés sont à l’origine de 60% à 75% des entrées de cadmium dans les sols.
Une fois épandu dans les champs, le cadmium contenu dans les engrais est absorbé par les végétaux et contamine, en bout de chaîne, les aliments.
Les chiffres alarmants sur la contamination au cadmium
La population française est fortement exposée au cadmium : chez les enfants, les concentrations mesurées par le programme national français de biosurveillance Esteban s’avèrent quatre fois plus élevées que celles des jeunes Allemands.
Cette même étude a révélé, chez les adultes, une imprégnation au cadmium qui a doublé entre 2006 et 2016 passant de 0,29 à 0,57 µg/g de créatinine. Dans ses recommandations, l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement) a fixé en 2019, pour la cadmiurie du non-fumeur, une concentration critique de 0,5 µg/g.
La même étude estime que 47 % des adultes et 18 % des enfants dépassaient le seuil de concentration critique.
Depuis 2019, l’Anses recommande d’abaisser la concentration maximale autorisée dans les engrais à 20 microgrammes de cadmium par kilogramme (mg/kg) de phosphore, contrairement à 60 mg/kg comme appliqué depuis 2022. La Commission européenne a indiqué vouloir atteindre ce seuil d’ici à 2034. Face à ce manque de concordance, aucune décision n’a été traduite dans le droit français.
L’impact sur la santé du cadmium
Le 5 juin, pour la journée mondiale dédiée à l’environnement, un collectif de médecins libéraux, regroupés sous la bannière des URPS (Unions régionales des professionnels de santé), s’alarme de l’exposition au cadmium de la société française, à la lumière des travaux menés par leur groupe dédié à la santé environnementale.
L’Anses a d’ailleurs qualifié le cadmium comme un métal « cancérogène, mutagène et toxique pour la reproduction, les reins et les os ». En 2019, cette même agence sanitaire avait observé un dépassement de la dose hebdomadaire tolérable (DHT), seuil après lequel un effet sur la santé est à prévoir. Fixé par semaine à 2,5 microgrammes de cadmium par kilogramme de poids corporel, ce seuil est franchi « chez 0,6% des adultes et 15% des enfants ».
En 2021, Santé publique France avait évoqué l’association inquiétante avec plusieurs cancers et notamment celui du pancréas d’après les données de l’étude Esteban.
Aussi, le cadmium peut provoquer des troubles de la reproduction, des atteintes rénales et une faiblesse osseuse, jusqu’à entraîner de l’ostéoporose.
Le collectif de médecins libéraux de l’URPS souhaite d’une part, informer les Français en mettant en place une campagne digitale et des documents d’information dans les cabinets libéraux. L’un des objectifs étant de cibler les personnes les plus à risque pour mettre en place des stratégies de dépistage des pathologies.
D’autre part, ils veulent un alignement le plus rapide possible aux recommandations de l’Anses sur la charge en cadmium maximale des engrais phosphatés.
Des dépistages remboursés en médecine de ville
Après cette nouvelle alerte sur la contamination des Français par ce métal toxique, le ministre de la Santé, Yannick Neuder, a annoncé le remboursement « à l’automne en médecine de ville » des dépistages.
Ces professionnels ont « fait remonter l’intérêt d’un dépistage » de cette substance ciblant les patients à risque, a reconnu Yannick Neuder, interrogé à l’Assemblée nationale.
Avant d’ajouter : « Ce dépistage est remboursé à l’hôpital et il le sera à l’automne en médecine de ville ».
Pour répondre à la deuxième demande du collectif des médecins libéraux concernant la teneur en cadmium maximale des engrais phosphatés, le ministre a affirmé qu’il sera « particulièrement vigilant sur l’arrêté que doit prendre le ministère de l’Agriculture sur ce sujet, comme l’ont fait d’autres pays, et notamment la Finlande, la Pologne ou la Roumanie ».
– Contamination au cadmium : un dépistage « à l’automne en médecine de ville », annonce Yannick Neuder. www.lequotidiendumedecin.fr. Consulté le 23 juin 2025.
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