Ces dernières années, le congé paternité des Français a évolué pour leur permettre de passer plus de temps auprès de leur bébé, et ce très rapidement après la naissance. Quel impact a ce congé paternité sur la santé mentale des jeunes pères ? Une récente étude française s’est penchée sur cette question. Explications.
Congé paternité et santé mentale
En France, le congé paternité et d’accueil de l’enfant est désormais un droit ouvert à tous les salariés, quelle que soit l’ancienneté et la nature de leur contrat avec leur employeur. Actuellement, ce congé paternité est d’une durée maximale de 25 jours consécutifs (samedi, dimanche et jours fériés compris) pour la naissance d’un enfant, une durée allongée à 32 jours en cas de naissance multiple. Ce congé paternité fait suite au congé de naissance de trois jours déclenché au moment de la naissance de l’enfant.
Les hommes peuvent faire le choix de prendre ce congé paternité en une seule fois, ou de le fractionner au cours des six premiers mois de la vie de l’enfant. Une équipe de recherche de l’INSERM s’est récemment intéressée à l’impact de ce congé paternité sur la santé mentale des hommes. Les chercheurs ont pris en compte les données de plus de 10 000 couples hétérosexuels (10 975 pères et 13 075 mères) participant à l’étude de cohorte ELFE (Etude Longitudinale Française depuis l’Enfance). Les mères avaient accouché en 2011 dans l’une des 320 maternités participant à l’étude en France métropolitaine.
Le congé paternité réduit le risque de dépression post-natale chez les pères
Les chercheurs ont cherché à évaluer si la prise d’un congé paternité de deux semaines après la naissance de leur enfant avait des effets positifs deux mois après la naissance, d’une part sur la santé mentale des pères et, d’autre part sur celle des mères. Les données collectées ont révélé que les hommes qui prenaient un congé paternité de deux semaines après la naissance de leur enfant étaient moins exposés au risque de dépression du post-partum que les hommes qui ne le prenaient pas. Rien que l’intention de prendre ce congé paternité, sans même le faire, avait un effet positif sur leur santé mentale.
Les hommes sont en effet exposés comme les femmes au risque de dépression post-natale. Selon les estimations, 17 % des femmes et 10 % des hommes développent cette forme spécifique de dépression. Dans l’étude plus de 64 % des pères avaient déjà pris un congé paternité, 17 % avaient envisagé de le faire et près de 19 % ne l’envisageaient pas. Les données mettent en évidence une réduction de 26 % du risque de dépression post-partum chez les pères prenant un congé paternité.
Allonger le congé paternité pour un bénéfice sur la santé mentale des mères ?
Le second résultat marquant de l’étude est plus surprenant, puisque les données montrent que la santé mentale des femmes est potentiellement impactée négativement par la prise du congé paternité par leur conjoint. Les femmes dont le conjoint avait pris un congé paternité présentaient un risque majoré de développer une dépression du post-partum, par rapport aux femmes dont le conjoint continuait à travailler. Pour les chercheurs, ce résultat pourrait indiquer qu’une durée de 15 jours pour le congé paternité n’est pas suffisante pour impacter positivement le risque de dépression post-natale chez la mère.
De plus, l’analyse fine des données révèle l’influence des facteurs démographiques et socio-économiques sur le lien entre congé paternité et santé mentale. Ces résultats ont été collectés avant les changements de durée du congé paternité. Les chercheurs souhaitent désormais évaluer l’impact sur la santé mentale du nouveau congé paternité, dont la durée a doublé. Dans une récente revue de littérature, des chercheurs suédois avaient mis en évidence que l’allongement du congé maternité était associé à une amélioration de la santé mentale des mères. La même évaluation reste à réaliser pour l’effet de l’allongement de la durée du congé paternité sur la santé mentale des pères et des mères.
Estelle B., Docteur en Pharmacie
– Le congé de paternité et d’accueil de l’enfant. AMELI Santé. ameli.fr. Consulté le 6 janvier 2023.