Les troubles de rumination ou mérycisme


Rédigé par Estelle B. et publié le 29 mars 2024

 

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Les troubles de la rumination ou mérycisme constituent un trouble gastro-intestinal assez rare, susceptible de toucher des jeunes enfants, et plus rarement des adultes. Le diagnostic est souvent complexe, en particulier chez les adolescents et les adultes, qui vont essayer de cacher ces troubles. Pourtant, une prise en charge est nécessaire pour limiter les conséquences des troubles de la rumination sur la santé et la qualité de vie.

Qu’est-ce que le mérycisme ou les troubles de la rumination ?

Les troubles de la rumination, également appelés le mérycisme, désignent une régurgitation répétée d’aliments en provenance de l’estomac, sans lien avec des nausées ou des vomissements . Cette régurgitation peut être volontaire ou involontaire. Les aliments sont ensuite remâchés avant :

  • D’être réavalés après un temps plus ou moins long dans la bouche ;
  • D’être recrachés à l’extérieur.

Les troubles de la rumination persistent sur plusieurs semaines ou mois.

À savoir ! Les troubles de la rumination ne doivent pas être confondus avec la rumination mentale, qui désigne l’un des symptômes du trouble anxieux généralisé. La rumination mentale correspond à des pensées obsessives, involontaires et répétitives, généralement associées à une détresse psychologique.

Les troubles de la rumination peuvent survenir à tous les âges de la vie, chez les nourrissons, les enfants, les adolescents et les adultes. C’est un trouble assez rare et très méconnu. Le manque d’études sur le sujet peut laisser penser que le phénomène est plus fréquent qu’on ne le pense. La description des troubles de la rumination s’est historiquement faite chez les nourrissons, les diagnostics étant plus rares chez les enfants, les adolescents et les adultes. Chez les jeunes enfants, les garçons seraient plus touchés que les filles, une tendance qui s’inverse avec l’âge.

Les causes des troubles de la rumination restent encore inconnues. Longtemps, ils ont été considérés comme des troubles psychiatriques. Désormais, ils sont classés dans les troubles gastro-intestinaux fonctionnels, c’est-à-dire sans lien avec une pathologie organique.

Quels sont les signes des troubles de la rumination ?

Les signes évocateurs des troubles de la rumination dépendent de l’âge des patients. Chez le nourrisson, ils s’observent plus facilement, en voyant l’enfant régurgiter après le repas puis remâcher les aliments avant de les avaler à nouveau ou de les recracher à l’extérieur. Généralement, l’enfant adopte une posture particulière au moment de régurgiter, posture que les parents peuvent apprendre à reconnaître. Les premiers symptômes apparaissent le plus souvent à partir de l’âge de 6 mois, lorsque l’enfant passe à une alimentation solide.

La régurgitation peut concerner des aliments liquides ou solides et survient généralement entre 10 minutes et 1 h après le repas.

Chez l’enfant plus grand, chez l’adolescent et l’adulte, le patient va tenter de cacher la rumination, par exemple en mettant sa main devant sa bouche. Lorsque les patients sont conscients du caractère anormal des troubles de la rumination, ils peuvent également réduire leur consommation de nourriture, ou recracher les aliments régurgités. Ils vont souvent fuir toutes les occasions de manger en public.

Au-delà des symptômes liés aux troubles de la rumination, le mérycisme peut avoir des conséquences importantes sur la santé et la qualité de vie :

  • Un ralentissement de la croissance chez l’enfant, avec une cassure de la courbe staturo-pondérale ;
  • Une perte de poids parfois importante chez l’adolescent et l’adulte ;
  • Des carences nutritionnelles;
  • Des affections de la sphère bucco-dentaire;
  • Un isolement social, accompagné de troubles anxieux et/ou dépressifs.

En cas de doute, il est important d’en parler avec le médecin. Sans diagnostic ni traitement, le mérycisme peut entraîner une inflammation de l’œsophage, l’œsophagite.

Comment savoir si mon enfant ou un adulte a des troubles de la rumination ?

Le patient va rarement se plaindre de lui-même des troubles de la rumination. Cette situation explique pourquoi ces troubles sont souvent diagnostiqués tardivement, plusieurs mois, voire plusieurs années après les premiers symptômes.

Le diagnostic est établi par le médecin, en fonction des symptômes du patient, lorsque les symptômes durent sur une période d’au moins 1 mois. Pour confirmer le diagnostic des troubles de la rumination, le médecin doit écarter toute pathologie gastro-intestinale sous-jacente, comme une malformation de l’appareil digestif, des troubles de la déglutition (dysphagie) ou un reflux gastro-œsophagien. Les troubles du comportement alimentaire, comme l’anorexie mentale ou la boulimie  doivent également être recherchés. Parfois, ces troubles peuvent être associés aux troubles de la rumination.

Le diagnostic des troubles de la rumination repose sur les signes cliniques, décrits par le patient lui-même ou par un proche (quand il s’agit d’un enfant). Plus rarement, le médecin peut observer lui-même la rumination. Il s’accompagne d’un bilan de santé pour évaluer :

  • L’état de santé global du patient ;
  • Son poids et son appétit ;
  • L’existence d’éventuelles carences nutritionnelles.

La recherche de troubles psychologiques ou d’une situation de vulnérabilité est également recommandée.

Comment traiter les troubles de la rumination ?

Comme les troubles de la rumination ne résultent pas d’une pathologie gastro-intestinale (il s’agit d’une pathologie fonctionnelle), il n’existe pas de traitement médicamenteux capable de stopper les symptômes. La prise en charge repose sur des thérapies comportementales, notamment des thérapies cognitivo-comportementales et des exercices de respiration diaphragmatique. L’objectif est de modifier le comportement du patient pour qu’il cesse de régurgiter et de remâcher les aliments ingérés. Chez l’enfant, un travail du lien entre la mère et l’enfant est mis en place, et s’avère généralement bénéfique rapidement.

À savoir ! Quelques études cliniques ont suggéré un effet bénéfique possible d’un médicament, le baclofène. Mais sa prescription n’est pas recommandée actuellement, car des données à plus grande échelle sont nécessaires.

Parallèlement, un suivi diététique et nutritionnel peut être nécessaire pour permettre au patient de retrouver une alimentation saine et équilibrée. Les éventuelles carences nutritionnelles sont prises en charge par des suppléments nutritionnels adaptés.

Dans les formes les plus avancées de mérycisme, une hospitalisation peut être nécessaire pour mettre en place une renutrition adaptée.

Estelle B., Docteur en Pharmacie

Sources
– Trouble de rumination. www.msdmanuals.com. Consulté le 27 mars 2024.
– Le mérycisme : quand l’être humain se met à ruminer. orbi.uliege.be. Consulté le 27 mars 2024.