Syndrome de Noonan


Rédigé par Estelle B. et publié le 30 mai 2024

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Le syndrome de Noonan est une maladie rare d’origine génétique caractérisée entre autres par un aspect particulier des traits du visage (dysmorphie faciale), des anomalies cardiaques congénitales et une petite taille. Il existe parfois un déficit intellectuel ainsi qu’un retard d’acquisition du langage. Il n’existe actuellement aucun traitement spécifique contre le syndrome de Noonan.

Qu’est-ce que le syndrome de Noonan ?

Décrit en 1963 par la cardiopédiatre Jacqueline Noonan, le syndrome de Noonan touche environ 1 enfant sur 2 000 naissances en France. Ce syndrome est une maladie rare d’origine génétique qui survient de façon sporadique dans plus de 80 % des cas ou selon une transmission autosomique dominante avec une expression variable.

À savoir ! Chaque être humain possède dans ses cellules (sauf les cellules sexuelles) 23 paires de chromosomes dont 22 paires d’autosomes et 1 paire de chromosomes sexuels (XX pour les femmes ou XY pour les hommes), soit 46 chromosomes par cellule. Chaque paire est ainsi composée d’une copie héritée du père et d’une copie héritée de la mère. Lorsque l’on parle de transmission autosomique dominante, le terme « autosomique » indique que le gène en cause dans la maladie n’est pas situé sur les chromosomes sexuels mais sur l’un des 22 autres chromosomes : les « autosomes ». La maladie peut donc apparaître aussi bien chez un garçon que chez une fille. Le terme « dominante » signifie qu’une seule copie altérée (mutée) du gène est suffisante pour que la maladie se déclare

Le syndrome de Noonan est la plus fréquente des RASopathies, les maladies liées à un dysfonctionnement de la protéine RAS. Cette protéine joue un rôle déterminant dans le développement de l’embryon in utero, en particulier le développement cardiaque, dans la transmission entre les neurones et dans la réponse cellulaire à l’hormone de croissance. Dans 40 à 50 % des cas, le syndrome de Noonan est dû à une mutation du gène appelé PTPN11 localisé sur le chromosome 12. Ce gène permet la fabrication de la protéine tyrosine phosphatase SHP-2 qui est présente en grande quantité dans l’organisme. Elle joue un rôle dans la régulation des informations échangées entre les cellules et intervient dans de nombreuses fonctions de l’organisme.

À savoir ! D’autres syndromes, proches du syndrome de Noonan, ont été décrits : le syndrome LEOPARD ou syndrome de Noonan avec lentigines multiples (tâches pigmentées sur la peau), le syndrome cardio-facio-cutané et le syndrome de Costello

Quels sont les signes du syndrome de Noonan ?

L’expression et la gravité du syndrome du Noonan sont très variables d’un individu à l’autre. Plusieurs atteintes peuvent être observées :

  • Une dysmorphie faciale et autres malformations ;
  • Le développement ;
  • Le cœur et les vaisseaux ;
  • La peau ;
  • La vision et l’audition ;
  • Les fonctions biologiques ;
  • Le risque de cancer.

La dysmorphie faciale et autres malformations

La région orbitaire et les oreilles sont les plus caractéristiques. Ainsi, on observe des yeux écartés (hypertélorisme) (75%), des paupières supérieures tombantes (ptosis) et les fentes des paupières dirigées vers le bas et le dehors. Les oreilles sont bas implantées, épaisses, inclinées en arrière, avec un lobe protubérant. Les piliers du philtrum (fossette qui se situe entre le nez et la lèvre supérieure) sont très marqués (95%). On peut également observer une micrognathie (développement insuffisant des os de la mâchoire) (50%) et un palais haut et arqué (45%). De plus, le cou est court avec un excès de peau (55%) et les cheveux ont une implantation basse.

La dysmorphie faciale évolue avec l’âge et devient moins caractéristique :

  • Le visage s’allonge et devient triangulaire ;
  • Le cou s’allonge également, rendant le ptérygium (malformation caractérisée par un cou palmé/des trapèzes proéminents) plus évident ;
  • Les traits s’épaississent avec une accentuation des plis nasogéniens (plis allant des ailes du nez à la commissure des lèvres).

Le syndrome de Noonan s’accompagne souvent d’anomalies thoraciques caractéristiques qui se manifestent par un pectus carinatum supérieur et un pectus excavatum inférieur (70 à 95 %) : le thorax est large, en forme de pyramide inversée et l’écart inter-mamelonnaire est augmenté.

Une scoliose est parfois retrouvée (25%) et survient surtout à l’adolescence.

À la naissance, on peut observer des pieds bots (5%) ou une contracture des doigts.

D’autres malformations ou anomalies peuvent être observées comme des malformations uro-rénales (10%), une hépato-splénomégalie (augmentation du volume du foie et de la rate).

Le développement

La croissance est souvent altérée dans le syndrome de Noonan, mais une taille normale n’exclut pas ce diagnostic.

Plus de la moitié des enfants présentent des difficultés alimentaires précoces conduisant à un retard de la croissance en taille et en poids dans la première année. Habituellement, les troubles alimentaires se résolvent spontanément dans l’enfance. Néanmoins, même en l’absence de difficultés alimentaires, le retard statural est présent chez plus de 50% des malades. Un déficit en hormone de croissance est parfois retrouvé, mais le bilan hormonal est généralement normal. La puberté et la maturation osseuse, fréquemment retardées, permettent un certain degré de « rattrapage » statural en fin d’adolescence. La taille adulte moyenne se situe autour de 162 cm chez l’homme et 152 cm chez la femme.

La puberté est retardée de 2 ans en moyenne mais reste spontanée le plus souvent. Chez les garçons, une cryptorchidie est commune (60%) c’est-à-dire que les testicules peuvent rester en position abdominale au lieu de descendre dans les bourses. Certains hommes peuvent présenter une infertilité même sans cryptorchidie. Chez les filles, l’âge moyen des premières menstruations est de 14 ans et la fertilité est normale.

Des difficultés d’apprentissage sont fréquentes (30 à 40%) chez les enfants atteints du syndrome de Noonan. Ainsi, un retard d’acquisition du langage s’observe chez 20% des enfants et la plupart d’entre eux conservent un déficit relatif des performances verbales et des difficultés articulatoires (72%). Une déficience intellectuelle (QI < 70) peut également être observée (20%) mais elle est rarement sévère. L’apprentissage de la lecture peut être difficile, surtout chez les enfants ayant eu un retard de langage oral. De plus, une diminution du tonus musculaire (hypotonie) est fréquente dans l’enfance et est généralement associée à un retard moteur (25%).

Différents troubles cognitifs ou psychopathologiques peuvent être observés :

  • Un déficit de l’attention et des fonctions exécutives ;
  • Un déficit de la mémoire auditivo-verbale et visuelle ;
  • Une altération des capacités d’interaction sociale avec difficultés de reconnaissance des émotions chez autrui (alexithymie) ;
  • Des troubles de l’humeur et de la régulation émotionnelle.

Le cœur et les vaisseaux

Les anomalies cardiaques sont très fréquentes (65 à 80%). Les plus caractéristiques sont une dysplasie de la valve pulmonaire et/ou une sténose pulmonaire supra-valvulaire. Cela se traduit notamment par un trouble du développement des valves pulmonaires. De très nombreuses autres malformations cardiaques peuvent être présentes, en particulier une communication interventriculaire (CIV) ou inter-auriculaire (CIA). Une cardiomyopathie hypertrophique (épaississement du muscle cardiaque) survient dans 20% des cas. Cet épaississement peut être présent dès la naissance ou se constituer avec l’âge.

La peau

La peau est habituellement sèche, avec une kératose pilaire (maladie de peau se caractérisant par une sécheresse importante et la présence de squames très fines). Une hyperkératose des paumes est souvent observée, entrainant la formation de « coussinets » due à l’épaississement anormal de la couche superficielle de la peau.

Des anomalies de la pigmentation de la peau sont fréquemment observées incluant des naevi pigmentés (grains de beauté) (25%), des tâches café-au-Iait (10%) et des lentigines (3%). La présence de ces dernières permet de définir un variant clinique du syndrome de Noonan : le syndrome de Noonan avec lentigines multiples (NS-ML).

Les cheveux sont bouclés, cassants et parfois épars. Les sourcils sont le plus souvent peu fournis.

La vision et l’audition

Des anomalies ophtalmologiques touchent plus de 90% des patients et regroupent principalement un strabisme (48 à 63%), des troubles de réfraction (61%) notamment la myopie et une amblyopie (absence de développement de la vision d’un œil) (33%).

Une perte auditive liée à des otites chroniques est une complication fréquente du syndrome de Noonan (15 à 40%). La surdité de perception ou surdité neurosensorielle est moins fréquente (10%).

Les fonctions biologiques

Un tiers des personnes atteintes du syndrome de Noonan présente des troubles de la coagulation d’intensité variable mais pouvant se révéler lors de chirurgies potentiellement hémorragiques. L’anomalie la plus commune est un déficit en facteur XI. Ces déficits en facteur de coagulation n’exposent pas à un risque hémorragique majeur mais sont responsables d’une prédisposition aux ecchymoses, aux saignements de nez et saignements post-opératoires.

Des anomalies plaquettaires telles que des thrombopénies (diminution anormale du nombre de plaquettes dans le sang) et des thrombopathies (maladies résultant d’une altération de la qualité des plaquettes sanguines) ont également été rapportées.

Des manifestations auto-immunes sont fréquentes (30% d’auto-anticorps antithyroïdiens), avec un risque d’hypothyroïdie tardive de 5%.

Le risque de cancer

Chez les personnes atteintes du syndrome de Noonan, il existe une prédisposition au développement de myélodysplasies et de leucémies.

À savoir ! La myélodysplasie est une maladie qui touche la moelle osseuse où sont produits les globules rouges, les globules blancs et les plaquettes. Ainsi, outre la production de cellules sanguines anormales, la moelle osseuse ne peut plus produire suffisamment de cellules sanguines normales

D’autres tumeurs ont également été rapportées telles que le rhabdomyosarcome, le neuroblastome,  le lymphangiome et le carcinome testiculaire. Le risque cumulé à 20 ans est de l’ordre de 4%.

Comment diagnostiquer le syndrome de Noonan ?

Le diagnostic du syndrome de Noonan est avant tout clinique, face à des signes évocateurs du syndrome chez l’enfant. Il peut être confirmé par un test génétique dans 70 à 80 % des cas. Au vu de la sensibilité actuelle du génotypage, ce dernier ne permet malheureusement pas d’exclure une suspicion diagnostique en cas de test génétique négatif.

Le diagnostic à la naissance repose sur la combinaison d’une dysmorphie faciale, d’un cou court avec un excès de peau, d’anomalies cardiaques et, plus rarement, lymphatiques. Cependant, ces symptômes sont inconstants et peuvent être discrets, comme en témoigne un âge moyen au diagnostic de 9 ans. La dysmorphie faciale du syndrome de Noonan est assez caractéristique, néanmoins, les traits du visage sont variables dans le temps et la dysmorphie évolue avec l’âge.

Compte-tenu de sa rareté, le diagnostic prénatal du syndrome de Noonan n’est proposé qu’aux familles déjà touchées par cette maladie dans les deux contextes suivants :

  • Un parent atteint du syndrome de Noonan ;
  • Un enfant de la fratrie atteint.

Une fois le diagnostic posé, la prise en charge débute par un bilan de la maladie. Chez le jeune enfant, l’équipe médicale recherche les malformations présentes, dépistent les troubles alimentaires, fréquents dès la première année de vie.

Quels sont les traitements du syndrome de Noonan ?

Aucun traitement ne permet aujourd’hui de guérir le syndrome de Noonan. Une prise en charge pluridisciplinaire et globale est mise en place dès le plus jeune âge et adaptée à la sévérité des signes du syndrome de Noonan.

La croissance de l’enfant est suivie de près. En cas de déficit, un traitement par l’hormone de croissance peut être indiqué, mais doit être discuté en raison d’une résistance à l’hormone de croissance chez les enfants atteints de syndrome de Noonan et d’une augmentation possible du risque de développer un cancer.

Par ailleurs, les troubles ORL, ophtalmologiques et développementaux sont recherchés et si besoin une prise en charge par un orthophoniste et/ou un psychomotricien est mise en place.

La fonction cardiovasculaire est suivie de près et les éventuelles malformations cardiaques peuvent nécessiter une ou plusieurs interventions chirurgicales au cours de l’enfance. Ces chirurgies peuvent laisser des séquelles à long terme, notamment des troubles du rythme cardiaque. Les adultes atteints du syndrome de Noonan présentent ainsi un risque majoré de mortalité par mort subite.

Enfin, la puberté peut être retardée chez les filles comme chez les garçons. La fertilité est normale chez les femmes. Chez les hommes, certaines formes d’infertilité masculine sont observées.

Estelle B., Docteur en Pharmacie

Sources
– Le syndrome de Noonan. ORPHANET. www.orpha.net. Consulté le 28 mai 2024.
– Les symptômes. Association Noonan. www.assonoonan.fr. Consulté le 28 mai 2024.
– Protocole National de Diagnostic et de Soins (PNDS) RASopathies : Syndromes de Noonan, cardio-facio-cutané et apparentés. www.has-sante.fr. Consulté le 28 mai 2024.

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